Voici dans les quelques pages de ce blog, ma manière de partager avec vous cette belle aventure...

samedi 29 septembre 2012

Le vol de nuit la nuit

La nuit, on voit parfois des Objets Volants Non Identifiés, ou difficilement identifiables. Dans la pénombre où règnent les rapaces nocturnes tels le hibou, la chouette ou encore la chauve souris certains objets de métal, ou de bois, s'aventurent dans les airs.




Chez TNT, et les autres transporteurs de colis par les airs, ces oiseaux de métal, Boeing 737 et consorts, volent essentiellement de nuit.

 

En effet, le courrier, c'est la nuit qu'il est transporté depuis l'autre bout de la France ou de l'Europe. Ainsi, demain matin, vous trouverez le facteur avec la lettre de mamie en vacances à Palavas...

Pour transporter le courrier, il y eu l'aventure de l’Aéropostale. Pour eux, et les autres pionniers de l'aviation, le courrier doit passer!


Et aujourd'hui, la nuit, c'est aux commandes de petits avions que certains pilotes, se croyant aventuriers et voulant découvrir le frisson du vol de nuit, se disent : ça passe!

Cet employé de TNT devait lui aussi se dire que "ça passe"... Mais ce n'est pas un pilote.



Bref, on entend parfois des avions voler la nuit. A bord de ces coucous, on y trouve des pilotes privés.

Les pilotes privés sont des pilotes amateurs. (Mais attention, on ne parle pas d'amateurisme, avec la péjoration qui va avec, mais juste de pilotes "non professionnels"...) Et un pilote privé est normalement formé pour ne voler que le jour... Car un pilote privé, normalement, il vole à vue. Et la nuit, on ne voit rien!!







Aparté horlogère : Les montres de pilotes sont depuis toujours faites pour pouvoir être lues dans le noir. Et les montres n'ayant pas de rétroéclairage, on a recouvert les aiguilles et autres indications de Tritium. Seulement, le Tritium est radioactif. Il est désormais interdit et été remplacé par une autre matière luminescente, le  Super-LumiNova®.

Les montres de pilotes sont donc toujours visibles dans le noir, donc la nuit... ouf!





Il serait en effet dommage d'avoir une si belle "Glashütte Original Senator Navigator" au poignet
et ne pas pouvoir l'utiliser en vol de nuit la nuit.


Coté formation, celle dédiée au vol de nuit la nuit est non comprise dans la formation de base des pilotes privés. Ces derniers, s'ils le souhaitent, peuvent passer la qualification qui incombe à qui veut faire du vol de nuit la nuit : le NVFR ( Night Visual Flight Rules).




Les pilotes professionnels sont obligés de pouvoir voler de nuit la nuit. Ainsi, avoir une qualification au vol de nuit la nuit m'est devenu obligatoire pour pouvoir avancer dans ma formation. 

Bien que facultative, je conseille la formation au vol de nuit la nuit à tout pilote privé qui se respecte. En effet, ce dernier, de retour de voyage, peut se voir dans l'impossibilité d'arriver à sa destination en toute sécurité car le vent est trop fort ou un retard en route est survenu. Il lui manque donc ce petit bout de temps pour arriver avant que le soleil se couche. Le risque : se retrouver hors la loi, mais pire encore, faire des erreurs, être désorienté et avoir un accident... car non formé au vol de nuit la nuit. C'est bête.

Du coup, au lieu de devoir se poser, tant qu'il fait jour, sur un terrain inconnu perdu dans la cambrousse, ou pire, dans un champ... on peut rentrer à la maison!



Et en plus, le vol de nuit la nuit, c'est... génial!! 

D'une durée de 5h, j'ai chercher à faire ma formation près de mon aérodrome d'attachement. Mais celui-ci n'est pas équipé pour voler de nuit la nuit... Aussi, c'est à Carcassonne que, le deuxième soir de vol de nuit la nuit, j'ai fait mes tours de piste en solo obligatoire. 

Chose bizarre, je suis en auto-information et personne n'est dans la tour ; je suis seul au monde! L'aéroport est même plongé dans le noir complet quand on arrive depuis les airs. C'est en actionnant une commande spécifique, en cliquant 3 fois sur le bouton du micro et en étant connecté à la fréquence de la tour, que la piste s'allume devant nous. La veille, j'avais pu apprendre à atterrir de nuit, je vais maintenant le faire seul à bord. Dans l'axe de la piste, je pose le PA28 du club et mon instructeur descend. En refermant la porte, je ne le vois déjà plus. Les taxiways sont noirs et je vois tout juste les lumières bleues des bordures. Mon phare éclaire à peine les premiers mètres à l'avant de mon hélice et c'est délicatement que je m'aligne. Dernières vérifications, pleins gaz, j'accélère et décolle. Passé les lumières de la piste, c'est un trou noir qui rempli l'environnement autour de moi. Pas le temps de chercher les repères au sol, il y en a pas. La ville de Carcassonne était encore un champ de lumière. Elle est maintenant masquée par mon capot moteur alors que mon hélice me tracte avec un vario positif plus qu'intéressant ; les 180 chevaux travaillent bien. Le ciel devant moi est confondu avec le relief : du noir, que du noir! On fait presque de l'IFR sauf que de l'IFR, je n'en ai jamais fait avant ce jour. Je contrôle donc la maquette de mon horizon artificiel et tente de procéder à un tour de piste dans les normes. L'écran EFIS de notre avion m'aide bien, je ne peux rater aucune information. 



Ayant décollé en piste 10, avec un tour de piste "main gauche", j'entame le décompte des degrés. Virage à gauche, cap 010, en montée vers 1400 pieds. Re-virage à gauche au cap 280 en arrêtant la montée. Le QFU exact est 276. Sans vent, je le place sur le bug de heading et me retrouve en étape de vent arrière. Là, je m'accroche à la piste qui reste éclairée, parallèle à moi. Mais je ne dois pas m'en approcher, bien qu'attiré par cette source de lumière qui, ce soir là, est vitale pour moi. La télécommande lançant l'éclairage pour 15 minutes seulement, je clique de manière frénétique sur le bouton de commande du micro pour être certain que la lumière ne se coupera pas. Et je m'éloigne dans la pénombre, la piste sortant de mon champ de vision. Etape de base, 280 moins 90 me donne un cap 190. La piste est là, sur ma gauche. Pour faire les choses proprement, je ne dois pas me laisser attirer par celle-ci. Lutter et finalement sentir le moment opportun où j'entame le dernier virage. Ça y est, elle est devant mois et en sortant un deuxième cran de volets, je descend vers elle.



L'approche finale est troublante. Dessous mon aile, rien de visible. Et devant, deux lignes de lumière jaune bien parallèle, malgré la forme de trapèze dans ma perspective. La ligne verte me donne une idée du seuil de piste, il ne faudra pas arriver avant... Je continue comme pour une approche de jour et dans les dernières secondes, avant le touché des roues, mon minuscule phare commence à peine à éclairer le sol. Là, j'arrondie et laisse l'avion toucher... Doucement, je maintien l'axe au palonnier et glisse vers le haut de ces derniers avec la pointe de mes pieds pour ensuite freiner fort et ainsi couper toute envie de voler à mon fidèle destrier du jour. Dehors, mon instructeur regarde cet OVNI, Objet Volant la Nuit Identifié, qu'il devinait encore à peine quelques secondes auparavant, via les feux de navigation. Je pense à lui qui doit bien se les cailler, alors que moi j'ai chaud! C'est un premier atterrissage de nuit "et en solo mesdames messieurs!" qui vient d'être opéré. Je vais en enchaîner cinq comme celui-ci avant que Vincent ne soit en mesure de remonter à bord. Plus tard, on va même essayer d’atterrir sans le phare. L'arrondie commence plus haut et on se laisse descendre... doucement, tout doucement. Les éclairages latéraux sont de plus en plus visibles dans le coin de l'oeil et boom, les roues touchent sans que l'on n'ai vu les lignes au sol, ou tout autre chose qui nous rappellerait la terre ferme... Bizarre et effrayant! On recommence?

Le retour à la maison, c'est à Toulouse Blagnac qu'on la fait. J'ai ainsi pu m'y poser durant les deux jours qui ont été nécessaire à cette qualification. Malgré la taxe d'atterrissage, l'expérience en vaut la peine. Le roulage non loin de l'A320 d'Air France qui sert de navette entre Toulouse et Paris se fait dans une atmosphère unique. Mais surtout, c'est le tour de ville de nuit la nuit qui restera encré dans ma mémoire.Voler au dessus d'une ville comme la ville rose, de nuit la nuit, est juste génialissime par la beauté de la vue. 

Voici la vidéo d'une approche sur Los Angeles. Vous verrez, c'est Top!


Moteur arrêté au parking Golf, carnet de vol signé, me voilà qualifié pour voler de nuit la nuit!

Merci à mon instructeur pour m'avoir fait découvrir cette beauté du vol qu'est le VFR by night... et pour m'avoir mis cette foutu expression dans la tête : "Le vol de nuit... la nuit".

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